La chronique de la dame athée

07 février 2001

      Je possède deux particularités qui font tout le charme de cette chronique : je suis femme et incroyante de naissance.
      Quand Simone de Beauvoir nous dit : « On ne naît pas femme, on le devient », si je saisis le sens général, je n'approuve pas la formulation. Pour ma part, il m'a suffit de naître de sexe féminin pour devenir une femme et je ne le regrette pas.
      Par contre, on ne naît pas féministe mais on le devient ; tout comme on ne naît pas athéiste mais on le devient. Il me semble que ces deux revendications vont de pair quand on constate la misogynie foncière des religions, sans exception. Avis aux intéressées. A ce propos, je me sens bien seule sur le web.
      - Où sont les femmes ? Comme dirait la chanson.
      Il paraît que nous ne surfons que sur les sites commerciaux, pour des achats. Il faut reconnaître que la plupart d'entre-nous, sorties de leur profession, des soins aux enfants, au mari, des courses, du ménage, ne font pas grand chose. Toutes des feignasses, je vous dis. Peut être que le bouche à oreille leur fera faire un petit tour par chez nous.

      Je suis donc née de sexe féminin dans un milieu rationnel laïque qui observait une relative méfiance envers les religions et les religieux sans engagement politique particulier. Cela m'a donné une liberté de penser naturelle et la possibilité d'observer les mœurs religieuses de l'extérieur, sans esprit de revanche.
      Je suis au parti du bon sens et n'ai foi qu'en l'objectivité. Je pratique assidûment la rationalité. C'est un exercice à plein temps. Je ne suis pas plus athée que ne sont Peaux-Rouge, les Sioux, Iroquois, Algonquins ; Esquimaux, les Inuits ; kangourou, le kangourou, mot qui, comme chacun sait, signifie : « je ne comprends pas ce que vous dites » dans la langue du coin. « Athées » est le nom attribué par les clergés divers aux réfractaires à leur endoctrinement. C'est une grosse insulte de leur part, un gros mot. Aussi, nous a t-il été « malicieux » de le reprendre à notre compte ironiquement.
      Ma devise à toujours été : « ce qui se conçoit bien s'énonce clairement » et si possible avec concision. Celle du groupe Les Athées d'Ille et Vilaine est : « Ce qui est affirmé sans preuve peut être nié sans preuve. » (Euclide).

      Athéo nous écrit : « l'athéisme du point de vue politique ne se distingue de la libre-pensée que par sa prise de position claire sur « dieu ». Mais un athéisme politique est le plus souvent mal vu des athées ».
      Cette réflexion venue tout droit du Québec est très juste. Seulement et même si on n'en a pas conscience, le fait de se déclarer athée est déjà un acte politique – et nous les « athéistes » (création-maison des Athées d'Ille et Vilaine) en avons parfaitement conscience. Mais voilà, où nous classons-nous politiquement ? Au Québec, je ne sais pas, mais ici, c'est plutôt la pagaille. En théorie, les églises étant réactionnaires, de droite, nous sommes progressistes de gauche ; seulement quand on constate que des chrétiens se proclament de gauche, que les socialistes font une politique de droite, que les communistes organisent une exposition sur Jésus, que les verts font cadeau aux chasseurs de jours de chasse aux oiseaux migrateurs, que le front national n'est plus qu'une moitié d'épouvantail, qu'il n'y plus que la droite pour feindre de croire à un pouvoir socialo-communiste à la tête de l'état, la vie de l'électeur moyen devient très compliquée. Je commence à me demander si je ne vais pas me faire naturaliser québécoise moi.
      Notre engagement politique reflètera cette ambiance pour le moins confuse, c'est à dire : « écolo-socialiste tendance libertaire ». Il est encore trop tôt pour décider si nous sommes « bakounistes », notre tendance étant plutôt « ni dieu ni maître à penser », nous nous contenterons d'être « babakoulistes ». C'est un bon début.

      En parlant de bon début, vous êtes déjà nombreux à nous rendre visite. C'est impressionnant pour les amateurs que nous sommes. Mais nous n'allons pas en devenir sérieux et ennuyeux pour autant. Comme le chantait Henri Salvador : « Faut rigoler, faut rigoler … Avant que le ciel nous tombe sur la tête » (paroles de Boris Vian, ingénieur écrivain trompettiste).


      La dame athée 07 février 2001